Suite de l'article "La nouveauté de 1924".
Les documents disponibles sur le Syndicat d'initiative de Poggiolo créé en 1924 (voir article du 15 juin) ne consistent pas seulement en circulaires et papier à lettres. Nous avons aussi la liste des adhérents grâce au carnet à souche de reçus de cotisations trouvé dans les archives de la famille CHABROLLE-BARTOLI.
Ce carnet donne de nombreux renseignements sur les 55 Poggiolais qui y adhérèrent pendant les quatre années d'activité du SI. Nous pouvons ainsi avoir une vision assez nette des Poggiolais actifs, c'est-à-dire de ceux qui voulurent faire avancer le village. N'oublions pas que cette association apparaît 6 ans après la première guerre mondiale pendant laquelle trente enfants du village ont disparu. Il fallait réagir à cette saignée.
COMBIEN DE POGGIOLAIS ACTIFS?
Chaque talon comprend le nom et le prénom de l'adhérent, sa profession, son adresse et la date du versement de la cotisation. Mais toutes les rubriques ne sont pas toujours remplies correctement ou remplies tout court.
Ainsi, Charles LOVICHI est orthographié LOVIQUI. Autre exemple: un FRANCESCHETTI Antoine Dominique, retraité, est mentionné uniquement en 1924 alors qu'un FRANCESCHETTI Dominique Antoine, retraité, est noté pour les années suivantes. Il est plus que probable qu'il s'agit d'une seule et même personne. De même, le Noël PINELLI, commissaire principal de la Marine hors cadre, adhérent le 18 mars 1924 est le même que le Jean Noël PINELLI qui a la même qualification professionnelle et qui verse une autre cotisation le 20 août. Compte tenu de ces réserves, ce document donne 53 personnes différentes.
Parmi leurs noms, on peut compter 8 CECCALDI et 8 DESANTI, 6 DEMARTINI et 6 MARTINI, 4 PAOLI et 4 PINELLI, 3 FRANCESCHETTI, 2 ANTONINI et 2 CARLI. 11 noms ne sont cités qu'une fois (ARNAUD, COLOMBANI, COLONNA, LAMON, LOVIQUI (sic), MOZZICONACCI, NIVAGGIOLI, OLIVA, PAPADACCI, PASQUALINI et VALENTINI). Pas de surprise: les familles les plus nombreuses et les plus anciennes de POGGIOLO sont bien les plus représentées dans cette liste.
Sur les trois femmes mentionnées, une seule (Julie LAMON) a ses nom et prénom complets. Les deux autres n'ont pas droit à leur prénom mais à celui de leur mari, et sont donc appelées Mme Noël CECCALDI et Mme Martin DEMARTINI.
Pour les prénoms, le décompte est difficile à cause de l'habitude des prénoms composés (il y en a 19). En comptant ceux-ci pour chaque fois deux, on arrive à 71 prénoms. Le plus usité est Jean (13 occurrences), suivi par François (9 fois) et Antoine (7 fois).
Une curiosité: COLOMBANI se prénomme Thimaute.
LEURS ACTIVITÉS PROFESSIONNELLES
La profession est mentionnée pour 37 adhérents. Comme beaucoup d'autres Corses de l'époque, ils travaillent surtout comme fonctionnaires.
L'activité la plus représentée est l'Enseignement (8 personnes dont 2 directeurs d'école), devant l'Armée (6 personnes), la Poste (4 personnes) et la Police (4 également). Parmi eux, 5 sont retraités. 5 autres sont retraités sans précision sur leur métier antérieur.
Il y a même un administrateur colonial (Hyacinthe DESANTI) et un sous-préfet (Charles LOVICHI).
Valère DESANTI exerce le métier particulier de "maître de phare".
Aucune mention d'artisan ou d'agriculteur (sauf Martin Archange PAOLI qui est qualifié de "propriétaire").
Cette liste est-elle donc représentative de la réalité poggiolaise ou des Poggiolais qui veulent agir car, comme le montre cet éventail, ils sont de milieux plutôt aisés et cultivés?
De plus, beaucoup d'entre eux n'habitent pas en Corse.
LA RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES POGGIOLAIS ACTIFS
7 adhérents seulement ont POGGIOLO comme adresse. Mais, comme pour 10 autres, aucune adresse n'a été indiquée, on peut supposer qu'ils devaient habiter au village. Du moins, on peut le supposer avec beaucoup de prudence car Charles LOVICHI est alors sous-préfet de BÔNE et son adresse habituelle ne peut être en Corse.
En 1924, les souches sont remplies par le trésorier Jean Noël PINELLI qui n'est pas le parlementaire (voir l'article du 4 juin) mais un homonyme, "lieutenant en retraite". Les adresses de tout le monde sont bien rédigées. Pour les années suivantes, le trésorier s'appelle CARLI et les indications deviennent moins précises.
Les adhérents n'habitant pas POGGIOLO ont leur domicile:
- en CORSE: 3 (1 à SOCCIA, 2 à AJACCIO)
- en FRANCE continentale: 17 (11 à PARIS, 3 à SAINT-DENIS, 1 à BAVAY dans le Nord, 1 à CAP FERRAT, 1 à MARSEILLE)
- dans les colonies: 10 en TUNISIE, 5 en ALGÉRIE, 1 au MAROC, 1 au DAHOMEY, 1 en GUYANE. Cette dernière catégorie représente donc 1/3 du total.
Paradoxalement, les Poggiolais les plus éloignés semblent être les plus attachés au développement du village.
Justement, il est à remarquer que l'idée du Syndicat d'Initiative semble venir d'Afrique du Nord. Tous les documents sortent de l'Imprimerie Libre, 23 Cours Bertagna, à Bône (Algérie). Bône est la ville où habitaient Toussaint PASQUALINI (qui ne cotisa qu'en 1924) et Antoine MARTINI (qui ne paya qu'en 1926). Mais le sous-préfet de BÔNE est alors Charles LOVICHI qui le restera jusqu'à sa retraite en 1927. Serait-ce lui la cheville ouvrière?
Dans le Bureau du Syndicat d'Initiative, le Président (Charles Antoine DESANTI) et deux membres du Bureau (César ANTONINI et Jean-Baptiste DESANTI) travaillaient à Tunis.
Si le déracinement de Poggiolais au profit de l'empire colonial est alors commun à toute la Corse, la curiosité est la sur-représentation de la TUNISIE (10 sur 18 "coloniaux"). Cette originalité se vérifie pour l'ensemble des communes des Deux-Sorrù à cette époque.
Elle tient à un élément historique bien particulier qui fera l'objet d'un prochain article.
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