Philippe PRINCE a retrouvé d'autres clichés de sortie en montagne, cette fois à Camputile.
Malheureusement, ils ne sont pas datés. Ils sont certainement de 1954.
Les identités ne sont pas mentionnées. On peut reconnaître sans hésitation Jean-Martin FRANCESCHETTI (1925-2013), juché sur un âne. C'est un peu plus difficile pour les autres.
Le 1er février 2023 est la date du cent-vingtième anniversaire de la naissance de Martin PAOLI qui fut conseiller général et maire de Poggiolo.
Fils de Bernard PAOLI et de son épouse Madeleine OTTAVY, Martin naquit donc le 1er février 1903 à Poggiolo.
Son père était un instituteur de valeur, à tel point que, le 17 mai 1925, le conseil municipal poggiolais lui vota une gratification de 150 francs "en récompense du zèle et du dévouement qu'il a toujours apporté dans l'accomplissement de ses devoirs professionnels et pour les nombreux succès obtenus par ses élèves au certificat d'études primaires." (voir l'article "Le bonheur d'enseigner")
Bernard Paoli avec ses élèves (photo transmise par Jacques-Antoine Martini).
Martin suivit le chemin de son père dans l'enseignement et milita également en politique, au sein du parti socialiste SFIO.
Il fut élu conseiller général du canton de Soccia le 23 septembre 1945 et devint vice-président du conseil général de la Corse (qui ne formait alors qu'un seul département).
Le 19 mars 1959, il succéda à la tête de la mairie de Poggiolo à Jean-François CECCALDI qui assumait cette fonction depuis 1919. La mairie, alors installée au rez-de-chaussée de la maison de l'ancien maire, fut transférée dans une maison appartenant à Martin PAOLI, juste à côté de la chapelle St Roch.
Ses nombreuses activités le retenant souvent à Ajaccio, Martin était représenté au village par son premier adjoint Laurent Antoine PINELLI, dit Antunarellu.
Lieu de la mairie du temps de Paoli. Photo Michel Franceschetti.
Martin PAOLI obtint la légion d'honneur par décret du 9 juillet 1949, notamment car "il se dépense avec ardeur, tact et conviction en faveur de l'école laïque et des œuvres scolaires", ainsi que l'écrivit dans son dossier Maurice PAPON, le préfet de Corse de l'époque.
Fonds Saveriu Paoli.
Cette photo de groupe, qui vient du Fonds Saveriu PAOLI et qui semble avoir été prise au cimetière, montre de gauche à droite:
Antunarellu,
puis Martin PAOLI,
Pierre LECA (merci à Jean-Marc TRAMINI pour l'avoir identifié),
Même si certains l'accusèrent de ne pas avoir fait assez pour le village, il faut mettre au crédit de Martin PAOLI le bétonnage, vers 1963-1966, du chemin mal empierré qu'était la stretta, la modernisation de l'éclairage public en août 1966 et surtout l'installation de l'eau courante dans toutes les maisons, en 1967-1968.
Sa mort, le 1er juin 1968, voici 55 ans, ne fut annoncée qu'avec retard dans la presse, les journaux ne paraissant pas à cause de l'effervescence sociale du moment.
On peut remarquer que sa mandature (19 mars 1959-1er juin 1968) correspond pratiquement à la présidence du général de Gaulle (8 janvier 1959 – 28 avril 1969).
De son mariage en 1925 avec la Socciaise Anne OTTAVY, il avait eu un fils Bernard qui fut rapidement élu maire de Poggiolo. Il le resta jusqu'en 1989.
Le conseil municipal élu en 1977. Bernard PAOLI est à droite. Photo Jacques-Antoine Martini.
Son siège de conseiller général revint, après une campagne acharnée contre le Socciais Ange CARLI, au Guagnais Jean Antoine GAFFORY.
Le conseil municipal actuel pourrait avoir une pensée pour cet ancien maire.
Voici la dernière série de dates se terminant par le chiffre "3" qui concernent des événements de l'histoire de Poggiolo.
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Septembre 1943 (il y a 80 ans): Mimi CANALE, de Guagno-les-Bains, débarqué en Corse avec les goumiers, est le premier soldat à entrer dans Vico libéré.
Septembre 1943 (il y a 80 ans): Jean-François CECCALDI, élu maire en 1919 et chassé par le gouvernement de Vichy, reprend la tête du conseil municipal. Il resta à ce poste jusqu'en 1959, soit un total de quarante ans.
19 juillet 1963 (il y a 60 ans): le séisme le plus important enregistré dans le Sud de la France (magnitude: 5,9 à 6) au cours du XXème siècle est ressenti à Poggiolo.
mars 1973 (il y a 50 ans): après de gros travaux, réouverture des thermes de Guagno-les-Bains par la société d'économie mixte gérée par Charles HOUVER. Le 16 mars 1976, la source est déclarée d'utilité publique par arrêté ministériel. Mais la fermeture intervint vingt ans plus tard.
1973 (il y a 50 ans):réforme cantonale qui supprime la moitié des cantons de Corse. Vico et Soccia deviennent les Deux Sorru. Dominique COLONNA, maire divers gauche de Vico, est le premier conseiller général de cette nouvelle entité.
2013 (il y a 10 ans): lors des travaux de restauration, CORTI, assistant de Marios SEPULCRE et arrière-petit-fils du peintre BASSOUL, décroûte la peinture verte de la chapelle Saint Roch et retrouve les couleurs originelles en brun marbré des colonnes.
Rien ne serait plus simple, si la volonté en existait, que de trouver où rendre hommage à "l'homme le plus cultivé de Corse": sa maison familiale.
Gian Antonio PINELLI, dont quatre articles de ce blog viennent de rappeler la vie très fournie, est né en 1760 dans la même demeure que là où il est mort en 1832.
La maison PINELLI serait une des plus anciennes de Poggiolo. Faisant partie des Case Suprane, elle domine la route actuelle.
Toutes les photos de cet article sont de Michel Franceschetti.
D'après une inscription aujourd'hui disparue, elle aurait être édifiée en 1610, puis elle fut agrandie pour atteindre ses dimensions actuelles en 1702, comme l'indique un linteau gravé.
Actuellement, la partie nord-ouest, la plus ancienne, est à Félicie et Dominique.
Mais aucune inscription, aucune plaque en ce lieu, aucune indication dans un quelconque dépliant. Les Poggiolais actuels sont-ils capables de penser aux Poggiolais d'antan?
Gian Antonio sera l'un des rédacteurs du Journal du département de la Corse, parce qu'il est au nombre des rares Corses qui ont aussi bien la maîtrise de la langue italienne que de la langue française.
Cet atout était important car ce journal, créé le 1er novembre 1817, fut bilingue jusqu’au 2 octobre 1824 (une colonne en français et une colonne en italien).
Destiné à faire connaître les lois, jugements et actes de l’administration, il était un véritable bulletin officiel et un instrument de la francisation de l’île. Il devint ensuite Le Journal de la Corse qui se fait une gloire d'être actuellement le doyen de la presse européenne.
L'auteur de la Chronique de la vieille Corse parue dans Le Petit Bastiais du 29 septembre 1943 écrit:
"Dans un sens, l'abbé Jean Antoine Pinelli peut être considéré comme le premier journaliste régulier que connut la Corse avec son premier journal également régulier".
Le Poggiolais continuait à servir l'administration française.
Pinelli fut l'un des conseillers du général Brenier de Montmorand, responsable d'une commission chargée d'évaluer les besoins de la Corse. Il est nommé conseiller général de Soccia le 11 mars 1818.
Il fut président du comité cantonal de Sorro in Sù de 1821 à 1825, fonction qui lui permit d’aider beaucoup ses concitoyens .
LE DEUS EX MACHINA DE L'ÉCOLE EN CORSE?
Même retiré dans son village d’origine, il continua à avoir une fort influence comme en témoigne l’abondante correspondance qu’il échangea, notamment sur les questions d’éducation.
Esprit REQUIEN était un naturaliste français, né le 6 mai 1788 à Avignon. Il se consacra très tôt à la botanique et réalisa le premier inventaire botanique de la Corse où il passa beaucoup de temps et où il mourut le 30 mai 1851 à Bonifacio. Plusieurs lettres de l’abbé PINELLI ou envoyées à celui-ci se trouvent dans les archives de REQUIEN sans que l’on sache très bien comment elles y sont arrivées.
D’autre part, les inspecteurs chargés de l’instruction publique en Corse écrivaient souvent à l'abbé PINELLI pour l’organisation de l’enseignement dans le canton ou dans l'ensemble de la Corse.
Ainsi, en janvier 1821, MOURRE félicita Gian Francesco pour son travail mais ne trouvait pas utile “d’établir une nouvelle école dans une petite commune qui en possède déjà trois” (il s'agissait de Soccia!!!). Un an plus tard, COTTARD l’informa qu’il acceptait la nomination du signor COLONNA comme instituteur à Guagno et en profita pour lui demander des lettres de recommandation pour des villes italiennes où le gouvernement l’envoyait en mission.
L’influence de l’ecclésiastique vivant bien loin d’Ajaccio était donc toujours forte. D’ailleurs, MOURRE et COTTARD ne manquaient pas de l’informer de leur nomination, maladie et mutation !
UN PRÊTRE SOUCIEUX DES AUTRES
Après avoir quitté ses fonctions à la Préfecture, Gian Antonio PINELLI devint curé de SOCCIA en 1821 ou 1822 et le resta jusqu’à sa mort.
L’Almanach du clergé de France de 1823 précise qu’il était un des deux seuls curés de deuxième classe de l’arrondissement et que sa fonction lui donnait autorité sur les desservants de GUAGNO, ORTO et POGGIOLO.
BENCI observe que, “retiré enfin à Poggiolo, il se consacra assidument à conseiller et à faire s'accorder les paroissiens, passant le reste du temps dans sa bibliothèque riche et choisie” (page 76 de Piero d’Orezza, traduite par Dominique ANTONINI-LIARD).
L’écrivain italien ajoute: “Je me rappellerai toujours avec grand plaisir cette brève mais douce entrevue que j'eus avec le docteur Pinelli, parmi ses livres, en grignotant en même temps une bonne omelette au brocciu que son bon cœur m'offrit.” Il promit à BENCI de lui donner des informations sur le fameux CIRCINELLU qui refusa de se soumettre à la France de Louis XV. Il mourut avant de pouvoir se rendre à GUAGNO pour interroger lui-même des témoins. Mais son neveu, Carlo Francesco Pasquale PINELLI, le filleul de Pasquale PAOLI, notaire et maire de POGGIOLO de 1822 à 1847, accomplit la promesse faite par son oncle.
Carlo Francesco était devenu greffier de justice de paix du canton de Soccia, peut-être avec l’aide de son grand-oncle Gian Antonio.
Il n’est pas interdit de penser que celui-ci ait permis à Carlo Francesco Pasquale de devenir maire de Poggiolo en été 1821 (à 26 ans, record dans l’histoire de la commune!). A cette époque, les maires des petites communes n’étaient pas élus mais désignés par le préfet, donc avec l’accord du gouvernement.
Gian Antonio décéda le 26 décembre 1832 à POGGIOLO, à l’âge de 72 ans. Le décès fut déclaré devant Carlo Francesco Pasquale PINELLI par deux autres de ses neveux : Gioan Vincenzo, curé, et Gioan Antonio, cultivateur (voir le dépouillement des registres d'état-civil par Pierre LECCIA, disponible sur Généanet).
Acte de décès de Gian Antonio Pinelli
La plupart de ses notes, notamment le manuscrit d'une monographie sur le département du Liamone, ont été confiées par ses héritiers à l'ingénieur Robiquet auteur d'un volumineux ouvrage sur l'île.
La réputation de grand intellectuel de l’abbé PINELLI et celle de la richesse de sa bibliothèque restèrent vives longtemps. Plusieurs livres et guides sur la Corse publiés au XIXème siècle en font mention. Par exemple, Jean-Ange GALLETTI, à la page 140 de son Histoire illustrée de la Corse, écrit en 1863: “POGGIOLO (...) a donné le jour à l’abbé PINELLI, ancien moine, et homme remarquable dans les belles-lettres”.
Depuis cette époque, il ne reste plus rien des livres accumulés par l’homme le plus cultivé de Corse.
Les souvenirs même de l'existence de Gian Antonio PINELLI, ce Poggiolais exceptionnel, se sont effacés. Dans le village, rien, pas même une petite inscription. Espérons que ce blog permettra de combler ce trou de la mémoire collective.
Décédé le 26 décembre 1832, voici exactement 190 ans, Gian Antonio PINELLI est bien oublié à Poggiolo. Mais les Poggiolais s'intéressent-ils vraiment à leurs ancêtres?
Gian Antonio PINELLI représenta Pasquale PAOLI lors d'un baptême à Poggiolo, comme l'a montré le second article de cette série.
Ce troisième article raconte ses actions et ses importantes fonctions à la fin de la Révolution et sous l'Empire, toujours d'après la notice rédigée par Eugène GHERARDI dans le Dictionnaire historique de la Corse.
Le texte de cette biographie, publié ici sur fond jaune, sera coupé par des explications et des compléments.
UNE RÉFÉRENCE DANS L'ENSEIGNEMENT
Eugène GHERARDI écrit que, après être allé habiter quelque temps à Florence,
Gian Antonio PINELLI retourne en Corse en 1796 où il est promu par l'évêque GUASCO à la charge de vicaire général du diocèse de Sagone; on le retrouve en 1805 prêtre à Piana.
Il doit s’agir de Matteu Francescu GUASCO, dernier évêque de Sagone de 1773 à 1801. Le Poggiolais voit donc de près la fin du diocèse.
PINELLI entame par la suite une carrière dans l'enseignement. Bénéficiant de l'amitié de Letizia Bonaparte et du cardinal Fesch, Pinelli est tour à tour directeur, en 1806, de l'école secondaire communale d'Ajaccio puis proviseur lorsque l'école devient collège en 1818.
La Revue encyclopédique de 1819 permet d'apprendre qu'il fut aussi “régent de rhétorique” et développa, lors de la rentrée des classes du 25 octobre 1818, devant toutes les autorités religieuses, civiles et militaires de la Corse, “le plan d’enseignement prescrit pour ce collège, et la supériorité de la méthode d’enseignement actuelle”.
Il avait donc la haute main sur l'enseignement en même temps qu'il dirigeait l'administration de l'île.
LE PILIER DE L'ADMINISTRATION NAPOLÉONIENNE
De 1810 à 1816, il est secrétaire général de la préfecture.
Gian Antonio exerça d’abord la fonction de secrétaire général du département du Liamone puis de toute la Corse quand celle-ci fut réunie en un seul département en 1811.
Il assista donc Ghjacintu ARRIGHI de CASANOVA, préfet du Liamone depuis 1803 et ensuite de toute l’île. Le 15 mars 1814, le nouveau préfet fut Francescu Saveriu GIUBEGA, neveu de Lorenzo GIUBEGA, parrain de Napoléon BONAPARTE. Le 5 septembre, Louis XVIII nomma François Louis Joseph de BOURCIER de MONTUREUX. Le 6 avril 1815, avec le retour de l’empereur, GIUBEGA revint... jusqu’au 14 juillet où le roi, de nouveau sur le trône, désigna Louis COURBON de SAINT GENEST.
Pendant cette période troublée, PINELLI resta à son poste et assura la permanence de l’administration française. Il aurait été l'homme le plus puissant de Corse sans le général MORAND qui imposait un ordre despotique et qui lui l'humilia en 1810.
En 1810, il a l'honneur d'être choisi pour assister au mariage de Napoléon, mais la délégation ne peut s'y rendre à cause de l'opposition du général Morand qui gouverne l'île.
Mariage de Napoléon et de Marie-Louise.
Avec la réinstallation de la monarchie des lys en France, en 1815, la carrière de Gian Antonio PINELLI, tout entière placée sous la protection des Bonaparte, n'était-elle pas terminée? Il en sera question dans l'article prochain.
Serait-ce par masochisme? MaisPoggiolo semble prendre un malin plaisir à ne jamais mettre en valeur son passé et son patrimoine.
Ainsi, rien n'a été fait pour évoquer la figure de l'homme le plus cultivé de Corse, Gian Antonio PINELLI, dont le décès a eu lieu le 26 décembre 1832, voici exactement 190 ans.
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On croit que Poggiolo est un petit village où rien ne se passe jamais et où aucun personnalité n'a émergé. Pourtant, cet enfant du village a eu une influence considérable en Corse pendant le Premier Empire et la Restauration.
Gian Antonio (Jean-Antoine) PINELLI est d'ailleurs le seul Poggiolais à être mentionné dans le Dictionnaire historique de la Corse publié sous la direction d'Antoine-Laurent Serpentini voici quelques années.
Pour le connaître, nous allons publier des articles en partant de la notice rédigée par Eugène GHERARDI dans ce Dictionnaire. Ce texte, publié ici sur fond jaune, sera coupé par des explications et des compléments s'appuyant sur des documents sérieux. Les intertitres ont été ajoutés par la rédaction du blog.
PINELLI, Gian Antonio (Jean-Antoine) (Poggiolo 6 sept. 1760 - id. 28 déc. 1832). Issu d'une famille originaire de Poggiolo,
Une erreur dans la date de décès: il se produisit le26 décembre 1832 et fut déclaré à la mairie de Poggiolo le 27, et donc pas le 28. Nous le verrons dans le dernier article de cette série.
Gian Antonio était le fils de Gioan Stefano PINELLI (1731-1786) et l’arrière-petit-fils de Natale (né vers 1690 et mort vers 1729), premier PINELLI connu à Poggiolo. Voir le dépouillement des registres d'état-civil par Pierre LECCIA, disponible surGénéanet.
LES ANNÉES DE FORMATION
c'est chez les frères du couvent de Vico qu'il effectue ses premières études,
C’est à Vico qu’il entra dans les ordres et qu'il commença à se faire connaître. Il était qualifié de diacono (diacre) dans le rapport établi par le podestat et les “padre del comune” (dont un était son père) daté du 30 avril 1783 et destiné à l’intendant royal qui voulait connaître la situation des écoles primaires. Agé de 23 ans, Gian Antonio avait alors 16 élèves. Voir l'article sur L'école poggiolaise au XVIII ème siècle.
On peut imaginer Gian Antonio tel que cette image extraite du Précis d'histoire de l'éducation en Corse(édité par le CRDP de Corse) représente un autre enseignant, Petru CIRNEU.
Il ne resta pas longtemps
avant de prendre le chemin de Rome où il se dote d'une solide formation en poursuivant des études de théologie à la Faculté Saint-Thomas-d'Aquin et des études de philosophie, de lettres et de droit à l'Archigymnasium Romanum. Il devient docteur «in teologia sacra» (20 déc. 1785) et docteur en droit (23 juil. 1789).
Sa culture phénoménale fera l’admiration de tous ceux qui le fréquentèrent. Ainsi, à la fin de sa vie, il rencontra Antonio BENCI, écrivain toscan qui, partisan du Risorgimento (l’unité de l’Italie), s’exila en Corse de 1831 à 1834. Dans sa préface à son roman Piero d’Orezza,BENCI écrivit, à la page 76, “Le docteur PINELLI lisait en plus de notre idiome (l’italien), le français, l’anglais, le latin, le grec, l’hébreu; et à l’érudition, il joignait l’étude des sciences physiques, économiques, du droit et je ne sais combien de fonctions et de charges il exerça !” (traduit de l’italien par Dominique ANTONINI-LIARD).
Destiné à faire une brillante carrière ecclésiastique dans la cité pontificale, Giao Antonio Pinelli accède à la charge de protonotaire apostolique (1er sept. 1789) et est accepté comme avocat de la curie romaine (11 juil. 1790). Ses activités sont aussi à caractère littéraire. Ainsi, le 11 mai 1790, est-il reçu “pastore” au sein du Sacro Collegio di Arcadia « col nome di Filelfo e con l'onore di pater recirare ne! Bosco Parrasio ».
UN DÉBUT DE VIE PUBLIQUE HÉSITANT
La Révolution Française, dont il semble approuver les principes, le ramène en Corse au printemps de 1790. Inscrit comme avocat au barreau de Bastia (25 juin 1790), il fait partie des trente-six membres de l'assemblée du département de la Corse. Il est élu par le district de Vico en même temps que Cittadella, Vincenzo Colonna et le chanoine Multedo. Opposé à la Constitution civile du clergé, Pinelli se retire dans son village où il s'occupe de sa très importante bibliothèque. S'il désapprouve le régime de terreur qui s'instaure en France, il n'accepte pas l'expérience du Royaume anglo-corse, et choisit de s'exiler à Florence.
Il ne se présenta pas pour l’élection du Parlement anglo-corse dans lequel Sorro in sù fut représenté par le podestat Francesco FRANCESCHETTI(voir article "Contestation ortigaise").
Pourtant, son frère Gian Stefano sert comme capitaine au sein d'une compagnie indépendante au service du roi d'Angleterre.
Giaon Stefano avait 10 ans de moins que Gian Antonio et mourut en 1857. Plusieurs milliers de Corses combattirent avec les Anglais contre la république française, certains même jusqu’à la fin du règne de Napoléon. Voir la fiche Wikipedia consacrée à ces troupes à l’adresse:
Oui, ils ont vraiment existé, les personnages dont les noms sont gravés sur les monuments aux morts.
Chaque 11 novembre, les cérémonies célèbrent des hommes qui ont vécu, grandi, aimé, souffert avant de tomber sur le champ de bataille.
Il reste à leurs familles de vieilles photos et aussi des lettres. La correspondance était le seul lien possible entre les soldats et leurs parents ou amis. Ils avaient besoin de ce véritable ballon d'oxygène pour oublier les horreurs du front et pour se sentir faire encore partie de la communauté familiale ou villageoise.
Ce blog a récemment publié le premier document de la guerre de 1914-1918 rédigé par François Marie Ceccaldi, document qui est un texte juridique: un testament.
Nous vous présentons maintenant les dernières lettres rédigées peu avant leur mort au combat par deux Poggiolais très différents qui sont mentionnés sur le monument aux morts de Poggiolo. La ponctuation et l'orthographe ont été respectées. Lettres et photos ont été fournies par les familles concernées.
Tout d'abord, les derniers écrits de Jean-Toussaint DEMARTINI.
Né le 1er novembre 1890, d'Antoine François DEMARTINI et Gracieuse DESANTI, il était timonier dans la Marine. Il dut la quitter pour des raisons liées aux élections municipales à Poggiolo (voir l'article en cliquant ici). Il entra dans l'infanterie coloniale et combattit au Togo, où il obtint une citation à l'ordre des troupes du groupe de l'A.O.F. (Afrique Occidentale Française) pour sa bravoure dans les combats contre les Allemands,puis en France. Il mourut le 9 février 1916 à Cappy dans la Somme.
Une lettre:
Aux tranchées le 30.1.1916
Mes chers parents
Toujours en bonne santé, je suis aux tranchées depuis trois jours, le 1er jour j'ai pris part à un rude combat, ma compagnie a beaucoup souffert, nous avons reçu des renforts et je crois que les Boches vont finir par croire que dans cette terrible guerre nous voulons le dernier mot.
Quant à mon ami, c'était un nommé Marcangelli il a trouvé la mort glorieuse; précisément sa permission avait été retardée. C'était un jeune homme plein d'avenir et mon meilleur ami à la compagnie. Son père avait travaillé à la maison Pinelli à guagno les Bains comme maçon, mais maintenant il n'est plus, laissons reposer le jeune héros en paix.
Toujours bien portant, je compte qu'il en sera de même par la suite.
Toujours dispos et le moral meilleur que jamais je vous embrasse bien affectueusement.
Toussaint
Une carte de correspondance:
4.2.1916
Mes chers parents
Je me porte toujours bien, et vous en souhaite autant.
Depuis 6 jours on se bat. Tout va bien pour le moment. Je vous embrasse
Toussaint Demartini
sergent 24ème colonial
5ème colonial
secteur postal 13
Deuxième série de lettres: celles deJean Ary François Léon LOVICHI.
Né le 10 novembre 1893 à Constantine, fils de Charles LOVICHI et Odile DELON, il était licencié de philosophie à la Sorbonne et préparait l'agrégation.
Bien que réformé, il voulut absolument défendre son pays. Aspirant au 2ème RMA, il partit se battre aux Dardanelles. Son attitude lui valut une citation et la promesse du grade de sous-lieutenant mais il fut tué au combat le 14 juillet 1915.
Jean Lovichi avec deux de ses sœurs dont une se prénommait Fanny.
Sans date mais étant une de ses dernières lettes:
J'allais commencer une longue lettre quand l'invitation est venue de repartir. Quelques embarras gastriques ont disparu et j'ai bien apprécié votre eau lithinée.
Je vis comme un capitaine et j'ai l'élixir le plus précieux, la confiance de mes hommes. J'ai vu des blessés qui ne voulaient pas être évacués avant d'avoir de mes nouvelles. Voilà la seule vraie récompense avec l'autre vos lettres qui redeviennent rares et que je lis avec mon cœur.
Vos petits paquets, précieux. Ajoutez livres et journaux, plumes, encre et crayons, une main-serviette pour "m'approprier": je suis chocolat et créole.
Je vous embrasse. Eu la joie de voir Théo Zanetacci ce matin.
Lettre du 6 juillet:
Retour de nouveaux combats. Je n'ai que la force, dans une fatigue de 5 jours d'action, de vous promettre une belle lettre.
Au camp, j'ai la joie de trouver deux lettres de maman, une - émouvante - de papa, et trois bons colis qui me comblent d'utile. La joie de ces lectures et de ces découvertes dans de pareils retours est un délice. Ô affection de mes parents!
Votre enfant vraiment à vous.
Mot du 11 juillet:
En action - constamment depuis le 21 -, je reçois une lettre de Fanny dont je suis heureux. J'en aurais voulu de vous tous. Pas trop fatigué et toujours paré. Parfait guerrier, vieux guerrier. Les cuisiniers redescendent*. Je vous embrasse.
* L'unité étant en première ligne, et afin d'éviter les pertes par trop d'allées et venues, les cuisiniers se chargeaient du courrier en plus de la nourriture.
Une lettre écrite par son père arriva aux Dardanelles après sa mort et fut retournée à l'envoyeur.
Un article a déjà été consacré à Jean LOVICHI: suivez le lien suivant:
Le rituel du 11 novembre permet d'honorer les Français tués pendant la guerre de 14-18 et même les morts de toutes les guerres. Les élus et la population se rassemblent autour du monument aux m...
Comme souvent, trop souvent, les occasions manquées pour mettre en valeur notre patrimoine s'ajoutent les unes aux autres.
Un exemple vient d'être donné avec le message reçu à l'adresse de contact du Blog des Poggiolais. Madame Michèle Renous a écrit:
Bonjour, je suis la nièce de Raymond Rifflard, la fille de sa soeur Raymonde. J’aimerais participer à toute célébration en mémoire de Raymond et correspondre avec toute personne qui l’aurait connu ou qui s’intéresserait à ses oeuvres.J’aimerais offrir 2 tableaux de Raymond à un musée corse, et j’aurais besoin de conseils et d’avis sur ce sujet !
Ce peintre avait exercé son talent en Corse, mais surtout dans les Deux Sevi et les Deux Sorru, à Letia, Vico, Evisa, Soccia, Orto (avec la fameuse fresque représentant le général de Gaulle).
Photo Ariane Chemin.
Son épouse était d'origine poggiolaise et au moins un de ses tableaux représente une partie de Poggiolo.
Photo Michel Franceschetti
Après l'oubli des quarante ans de son décès, Raymond Rifflard, né en 1902, souffrira-t-il également de l'ignorance des 120 ans de sa naissance?
En attendant, quel est le maire ou le responsable culturel qui va répondre à la nièce de notre artiste?
Raymond RIFFLARD, un peintre bien de chez nous Le peintre Raymond RIFFLARD a laissé de grandes traces dans les Deux Sevi et les Deux Sorru. Cet artiste décéda à Sagone en 1981, voici quarante a...
Non, il ne s'agissait pas de Marc Antoine CECCALDI qui, en ce matin du 26 septembre 1892, courait de tous côtés dans la maison de sa famille CECCALDI et dans la rue de Poggiolo car un groupe de Guagnais armés venait d'arriver et se rafraîchissait chez le maire Pierre MARTINI, avant de repartir vers Soccia.
Les articles précédents ont raconté ce sanglant fait divers qui aboutit à la mort de deux gendarmes.
Le Mexicain était François Marie CECCALDI, le fils de Marc Antoine.
Marc Antoine s'était installé au Mexique lors de l'expédition militaire de Napoléon III. Il vivait à La Piedad, dans l'Etat de Michoacan, sur la côte de l'Océan Pacifique. C'est là que naquit son fils le 4 janvier 1869. Il l'appela François Marie en souvenir de son frère tué en 1859 dans une bagarre à Soccia.
La tradition orale poggiolaise donne à François Marie une mère mexicaine. Mais, sur le registre matricule militaire (fiche 9 NUL 30/2147– Archives Pumonti), il est inscrit le nom de "feue Thérèse COLONNA", une Corse donc, et morte avant 1891, date de la rédaction de sa notice individuelle.
Marc Antoine revint en Corse, longtemps après, en 1892, avec son fils François Marie, semble-t-il.
Il était donc arrivé depuis quelques mois dans la maison familiale quand, le 26 septembre 1892, il entendit le remue-ménage provoqué par la troupe des Guagnais en route pour leur coup de force à Soccia. Se croyant revenu dans les turbulences mexicaines,il réagit comme décrit au début de cet article.
Mais que devint le fils de Marc Antoine?
UN MEXICAIN DANS L'ARMÉE FRANÇAISE
François Marie, inscrit sur les listes françaises de recensement militaire, fut déclaré insoumis le 30 juin 1891 pour ne pas s'être présenté au conseil de révision. Mais il obtint un non-lieu en se présentant volontairement au bureau de recrutement d'Ajaccio le 3 juin 1893.
Il semble que, avant de quitter le continent américain, il ait servi dans l'armée mexicaine. Peut-être aurait-il participé à un coup d'Etat qui aurait échoué.
En tout cas, il fit ensuite carrière dans les troupes coloniales françaises pendant une quinzaine d'années, jusqu'en 1909: 4e, 13e et 4e régiments de marine, puis 22e régiment d'infanterie coloniale. Il servit notamment pendant la seconde campagne de conquête de Madagascar, d'avril 1895 à juin 1900, ce qui lui permit de recevoir plusieurs décorations. Il servit également à La Martinique.
François Marie vint ensuite habiter à Poggiolo où il était surnommé "U Messicanu". Six mois après avoir quitté l'armée, il se maria le 30 octobre 1909 avec Angèle Françoise MARTINI (1867-1928), dite "Mozza", veuve de Xavier VINCIGUERRA (1850-1905), de qui elle avait eu plusieurs enfants. Elle fut l'arrière-grand-mère de Jacques-Antoine MARTINI, qui nous a donné la photo ci-dessous, et du reste de sa famille.
U Messicanu et Mozza.
SOLDAT ET AGRICULTEUR
Quand éclata la première guerre mondiale, en août 1914, l'armée française le rappela. Il fut versé dans l'infanterie, puis dans l'artillerie.
Le 2 août 1914, au moment de sa mobilisation et alors que l'Allemagne déclara la guerre le lendemain, François Marie rédigea un testament. "Partant pour la guerre et ne connaissant pas les secret (orthographe respectée) de Dieu", il donnait tout à son épouse. Soldat expérimenté, il savait que son retour n'était pas certain et il voulait que "Mozza" ne manqua de rien. Combien de mobilisés de 1914 eurent cette délicate attention?
"U Messicanu" échappa aux balles allemandes et il bénéficia, le 23 février 1917, du statut de "détaché agricole comme propriétaire exploitant à Poggiolo".
Libéré de toute obligation militaire le 1er décembre 1918, François Marie put profiter de sa retraite jusqu'à son décès le 12 novembre 1931. Son épouse était décédée deux ans auparavant.
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Certains renseignements qui ont permis de rédiger cet article ont été trouvés dans le registre matricule militaire des Archives de Corse et dans les fiches généalogiques rédigées par Pierre LECCIA sur le site GENEANET. D'autres ont été fournis par Xavier PAOLI. Les deux documents viennent de Jacques-Antoine MARTINI.
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blog consacré à Poggiolo, commune de Corse-du-Sud, dans le canton des Deux-Sorru (autrefois, piève de Sorru in sù).
Il présente le village, ses habitants, ses coutumes, son passé et son présent.
Accroché à la montagne, pratiquement au bout de la route qui vient d'Ajaccio et de Sagone, POGGIOLO est un village corse de l'intérieur qui n'est peut-être pas le plus grand ni le plus beau ni le plus typé. Mais pour les personnes qui y vivent toute l'année, comme pour celles qui n'y viennent que pour les vacances, c'est leur village, le village des souvenirs, des racines, un élément important de leur identité. POGGIOLO a une histoire et une vie que nous souhaitons montrer ici. Ce blog concerne également le village de GUAGNO-LES-BAINS qui fait partie de la commune de POGGIOLO. Avertissement: vous n'êtes pas sur le site officiel de la mairie ni d'une association. Ce n'est pas non plus un blog politique. Chaque Poggiolais ou ami de POGGIOLO peut y contribuer. Nous attendons vos suggestions, textes et images. Nota Bene: Les articles utiliseront indifféremment la graphie d'origine italienne (POGGIOLO) ou corse (U PIGHJOLU).