Comme tous les habitants de Sorru in sù, les Poggiolais eurent à subir les exactions de Théodore POLI (précédents articles sur Théodore: ICI, LÀ et encore ICI). Il leur fallait se méfier en empruntant les routes et il était préférable de se regrouper. Cette précaution n'était pas toujours suffisante, comme le montra l'embuscade de 1824 où un voltigeur et un Poggiolais furent abattus (voir l'article ). Le maire de Poggiolo dut même véritablement mobiliser ses concitoyens. L'épisode est conté à la fois par Henri PIERHOMME et François-Guillaume ROBIQUET.
COMMENT PROTÉGER LE PAYEUR?
Le 29 juillet 1822, M. POZZO DI BORGO, payeur de la Corse, se trouvait à GUAGNO-LES-BAINS (qui est appelé POGGIOLO-LES-BAINS dans le livre de PIERHOMME). Il devait se rendre à VICO porteur d'une grosse somme. Mais il avait reçu plusieurs messages de plus en plus menaçants du BRUSCO, le principal lieutenant de Théodore, qui voulait le racketter (le mot n'existait pas encore mais la réalité oui).
/image%2F0574608%2F20250307%2Fob_fd13ca_embuscade.jpg)
D'après Henri PIERHOMME, le maire de POGGIOLO, "se méfiant à juste titre de l'insécurité qui régnait dans la région, eut l'idée d'escorter le payeur avec une quarantaine de montagnards armés et résolus".
Si son nom n'est pas donné, on peut supposer que cet édile courageux et prévoyant était Carlo Francescu Pasquale PINELLI. Nommé alors par le préfet, ce maire resta en place de 1821 à 1847. A partir de 1841, il eut comme adjoint Antoine-François FRANCESCHETTI.
UN MAIRE TRÈS PARTICULIER
Mais ce maire était un personnage très particulier. En effet, il était le filleul de Pasquale PAOLI, "u Babbu di a Patria".
Pour montrer leur attachement au Général de la Nation, plusieurs familles de notables lui demandèrent d’être le parrain de leurs fils.
Le baptême de Carlo Francescu Pasquale PINELLI, fils de Gioan Natale Pinelli et de son épouse Maria Leca, eut lieu en l’église Saint Siméon le 30 septembre 1795, à l'époque du royaume anglo-corse.
L’acte du baptême indique que, Pasquale PAOLI n'étant pas présent, sa procuration avait été attribuée «nella persona del Signor Dottor Giovantonio pinelli».
Il est facile de reconnaître sous ces mots Gian Antonio PiNELLI, surnommé «l’homme le plus cultivé de Corse», qui était le grand-oncle du jeune baptisé.
Carlo Francesco Pasquale devint greffier de justice de paix du canton de Soccia, peut-être avec l’aide de son grand-oncle Gian Antonio.
Il n’est pas interdit de penser qu’il ait également permis à Carlo Francesco Pasquale de devenir maire de Poggiolo en été 1821 (à 26 ans!). A cette époque, les maires des petites communes n’étaient pas élus mais désignés par le préfet, donc avec l’accord du gouvernement. Sa vie est racontée ICI.
THÉODORE HUMILIÉ
Donc, en 1822, le maire mobilisa donc une forte escorte (le recensement de 1821 donnait alors une population de 170 habitants dans la commune).
THÉODORE et BRUSCO s'étaient postés derrière un rocher, sur la route de Sorru, "à une lieue environ" de GUAGNO-LES-BAINS, soit 4 km. En voyant arriver la troupe, les bandits renoncèrent à lancer l'assaut. Ils se contentèrent de tirer quatre balles qui tombèrent aux pieds des paysans et ils s'enfuirent en montrant le poing tandis que les Poggiolais leur criaient, d'après ROBIQUET: "Pourquoi fuyez-vous? Venez ici si vous l'osez !".
Mais de tels actes furent rares et Théodore poursuivit sa carrière jusqu'à sa mort en 1827.
(à suivre)