On croit que Poggiolo est un petit village où rien ne se passe jamais et où aucun personnalité n'a émergé. Pourtant, un enfant du village a eu une influence considérable en Corse pendant le Premier Empire et la Restauration. Il s'agit de Gian Antonio (Jean-Antoine) PINELLI. Il est d'ailleurs le seul Poggiolais à être mentionné dans le "Dictionnaire historique de la Corse" publié sous la direction d'Antoine-Laurent Serpentini voici quelques années.
Pour le connaître, nous allons publier trois articles en partant de ce livre, en recopiant la notice rédigée par Eugène GHERARDI. Ce texte, publié ici sur fond bleu, sera coupé par des explications et des compléments s'appuyant sur des documents sérieux. Les intertitres ont été ajoutés par la rédaction du blog.
PINELLI, Gian Antonio (Jean-Antoine) (Poggiolo 6 sept. 1760 - id. 28 déc. 1832). Issu d'une famille originaire de Poggiolo,
Il était le fils de Gioan Stefano PINELLI (1731-1786) et l’arrière-petit-fils de Natale (né vers 1690 et mort
vers 1729), premier PINELLI connu. Voir dépouillement des registres d'état-civil par Pierre LECCIA, disponible sur
Généanet.
LES ANNÉES DE FORMATION
c'est chez les frères du couvent de Vico qu'il effectue ses premières études,
C’est à Vico qu’il entra dans les ordres et qu'il commença à se faire connaître. Il était qualifié de diacono (diacre) dans le rapport établi par le podestat et les “padre del comune” (dont un était son père) daté du 30 avril 1783 et destiné à l’intendant royal qui voulait connaître la situation des écoles primaires. Agé de 23 ans, Gian Antonio avait alors 16 élèves. Voir l'article sur L'école poggiolaise au XVIII ème siècle.
On peut l'imaginer tel que "Le précis d'histoire de l'éducation en Corse" (édité par le CRDP de Corse) représente un autre enseignant, Petru CIRNEU.
Il ne resta pas longtemps
avant de prendre le chemin de Rome où il se dote d'une solide formation en
poursuivant des études de théologie à la Faculté Saint-Thomas-d'Aquin et des études de philosophie, de lettres et de droit à l'Archigymnasium Romanum. Il devient docteur «in teologia sacra» (20
déc. 1785) et docteur en droit (23 juil. 1789).
Sa culture phénoménale fera l’admiration de tous ceux qui le fréquentèrent. Ainsi, à la fin de sa vie, il
rencontra Antonio BENCI, écrivain toscan qui, partisan du Risorgimento (l’unité de l’Italie), s’exila en Corse de 1831 à 1834. Dans sa préface à son roman “Piero
d’Orezza”, celui-ci écrivit, à la
page 76, “Le docteur PINELLI lisait en plus de notre idiome (l’italien), le français, l’anglais, le latin, le grec, l’hébreu; et à l’érudition, il joignait l’étude des sciences physiques,
économiques, du droit et je ne sais combien de fonctions et de charges il exerça!” (traduit de l’italien par Dominique ANTONINI-LIARD).
Destiné à faire une brillante carrière ecclésiastique dans la cité pontificale, Giao Antonio Pinelli accède à la charge de protonotaire apostolique (1er sept. 1789) et est accepté comme avocat de la curie romaine (11 juil. 1790). Ses activités sont aussi à caractère littéraire. Ainsi, le 11 mai 1790, est-il reçu “pastore” au sein du Sacro Collegio di Arcadia « col nome di Filelfo e con l'onore di pater recirare ne! Bosco Parrasio ».
UN DÉBUT DE VIE PUBLIQUE HÉSITANT
La Révolution Française, dont il semble approuver les principes, le ramène en Corse au printemps de 1790. Inscrit comme avocat au barreau de Bastia (25 juin 1790), il fait partie des trente-six membres de l'assemblée du département de la Corse. Il est élu par le district de Vico en même temps que Cittadella, Vincenzo Colonna et le chanoine Multedo. Opposé à la Constitution civile du clergé, Pinelli se retire dans son village où il s'occupe de sa très importante bibliothèque. S'il désapprouve le régime de terreur qui s'instaure en France, il n'accepte pas l'expérience du Royaume anglo-corse, et choisit de s'exiler à Florence.
Cependant, il fut bien présent à la consulte du 19 juin 1794 en tant que représentant de la Comunità de POGGIOLO et
signa l’Atto Costituzionale qui désigna le roi d’Angleterre comme roi de Corse, comme le montre la page 385 de "Pièces et documents divers pour servir à l'histoire de la Corse : pendant la Révolution française. T2 / recueillis et publiés par M. l'abbé Letteron".
Il ne se présenta pas pour l’élection du Parlement anglo-corse dans lequel Sorro in sù sera représenté par le
podestat Francesco FRANCESCHETTI (voir article "Contestation ortigaise").
Pourtant, son frère Gian Stefano sert comme capitaine au sein d'une compagnie
indépendante au service du roi d'Angleterre.
Giaon Stefano avait 10 ans de moins que Gian Antonio et mourut en 1857. Plusieurs milliers de Corses combattirent avec les Anglais contre la république française, certains même jusqu’à la fin du règne de Napoléon. Voir l'article très documenté sur ces troupes à l’adresse: https://sites.google.com/site/tirailleurscorses/home/les-troupes-du-royaume-anglo-corse.
Après un temps d'éloignement, le moment de s'affirmer allait arriver.