Si l'annuaire de 1938 recopié par les éditions Albiana affirmait faussement qu'il existait une gare à Poggiolo (voir article sur ce livre), il n'en est pas moins vrai qu'un projet de chemin de fer reliant Ajaccio à Vico a bien existé. Il a été mis en avant par le conseil général de la Corse en 1886 mais n'a jamais eu le moindre début de commencement.
Ce projet est décrit par François PAOLI dans son récent livre "Letia et la région de Vico dans l'histoire de la Corse", à la page 222. Nous le citons en entier en ajoutant une carte tirée de la revue "A mimoria" de mai 1994 qui donne des renseignements supplémentaires sur le projet de ce train-fantôme (voir à l'adresse: http://chemindefercorse.free.fr/amimoria.pdf).
A la fin des années 1870, le 7 décembre 1879, nous avons vu donner le premier coup de pioche pour le train
devant relier Ajaccio à Bastia. Le projet était, à cette époque, de construire, un peu comme en Sicile, un chemin de fer qui ferait le tour de l'île. Mais ce n'était pas, pour autant, le seul
projet. Dès le 24 septembre 1886, le conseil général vote une somme de 3.000 francs pour les études préliminaires «d'une ligne Ajaccio-Vico, chemin de fer d'intérêt local», et le rappelle dans
une délibération du 25 septembre 1887, Ainsi, le 1er octobre 1887, le préfet prie l'ingénieur «de procéder d'urgence à
ces études préliminaires», en autorisant les divers agents utiles à ces études à pénétrer, si nécessaire, dans les propriétés privées.
Les communes concernées sont Sarrola-Carcopino, Afa, Appietto, Calcatoggio, Saint-André d'Orcino, Casaglione,
Ambiegna, Arro, Lopigna, Azzana, Salice, Rosazia, Murzo, Letia et Vico, soit plus de 60 kilomètres de ligne, en pays accident. Un rapport sera établi à la date du 11 juillet 1888, rendant compte
des difficultés rencontrées, du fait «de pluies persistantes d'une abondance jusqu’à présent inconnue en automne. ».
Partant un peu après la station de la Mezzana, le tracé envisagé traversait la RN 193, puis le canal de la
Gravona, Afa et Piscia Rossa, avant de franchir, par un petit tunnel, le col de Listincone, puis, par un grand tunnel de 600 mètres, celui de San Bastiano, pour atteindre Calcatoggio. De là, on
aurait gagné Saint André d'Orcino et Cannelle, pour monter ensuite vers Sari. Sept gares étaient nécessaires pour arriver à Sari, et, «Au-delà, il n'était fait qu'une reconnaissance du
terrain.».
Le col d'Ambiegna, à 349 mètres d'altitude, étant franchi, on redescendait sur Ambiegna, Arro et Lopigna, où
deux petits tunnels étaient nécessaires, puis on passsait sur la rivière Cruzzini, pour remonter, et franchir le Liamone près du gué de Traghetta alla Rena, à 299 mètres d'altitude. Il restait
4.500 mètres à parcourir pour arriver à Vico, à 389 mètres d'altitude, en passant par Murzo, et en franchissant de nouveau le Liamone en contrebas de Saint-Martin, La longueur totale du tracé
serait finalement de 74.891 mètres, et l'estimation du coût des dépenses se monterait à la modique somme de dix millions de francs!
Le conseil général ne devait pas donner suite, mais il allait quand même renouveler les études préliminaires en 1890. Lors de la venue en Corse du président de la République, Sadi Carnot, en avril 1890, les conseils municipaux de la région de Vico devaient émettre de nouveaux vœux en faveur de ce projet, et, le 10 septembre 1911, le conseil municipal de Vico devait émettre:
... très énergiquement le vœu que les services compétents soient chargés de préparer dans les plus brefs délais un projet de
chemin de fer Bonifacio-Sartène-Ajaccio-Calcatoggio-Sari-Arbori- Vico-Sagone-Cargèse-Piana-Calvi.
L'ingénieur en chef Jeannin répondra, le 4 novembre 1911, que:
... dans la présente situation financière du département, ce vœu ne nous semble pas susceptible de recevoir actuellement une suite favorable.
Et ce fut tout...
D'autres renseignements se trouvent dans l'ouvrage de Paul SILVANI intitulé "Train de Corse, train rebelle" et publié... aux éditions ALBIANA