La devinette posée voici quelques jours demandait quelle est, en dehors de Philippe FRANCESCHETTI (de Poggiolo), l'autre personne originaire de Sorrù in Sù (plus précisément de Guagno) à avoir été honorée par un nom de place à Marseille.
La réponse est:
PHILIPPE CERATI.
Philippe Antoine CERATI a son nom inscrit sur une belle plaque de couleurs, œuvre de l'artiste marseillais Bernard BRANDI, à l'entrée d'une petite place marseillaise.
Philippe CERATI est né à Guagno le 5 janvier 1867. Pharmacien, il s'est très vite lancé dans l'action politique. Militant du Parti Socialiste S.F.I.O., il se présente aux élections de 1908 dans le quartier de la Belle-de-Mai. Il est élu conseiller municipal en 1914, puis en 1919 sur la liste de Siméon FLAISSIERES. Il en devient l'adjoint aux emplacements. Il est également administrateur du bureau de bienfaisance. Sa position lui permit de placer quelques compatriotes dans l'administration marseillaise. Par ailleurs, il est le fondateur des A.I.L. (amis de l'Instruction Laïque) du sixième canton.
Son décès accidentel fut annoncé ainsi dans le journal de gauche "Le Petit Provençal" du dimanche 27 février 1921:
"C'est à la villa Fontaine que M. Cerati possède à Maldormé (au bord de la mer, entre les Catalans et la Corniche) et où il était allé passer quelques jours, que le triste accident, dû à une crevaison d'un tuyau de gaz, s'est produit. L'adjoint au maire était trouvé hier matin, sur son lit, asphyxié par les émanations du gaz d'éclairage".
L'émotion fut intense et se montre dans la relation que ce même quotidien fit le lendemain des obsèques qui eurent lieu le 27.
Le corbillard, dont le poële (le drap mortuaire) était tenu par six adjoints, était suivi par le fils et le frère du défunt (Antoine, lui-même conseiller général), puis le sénateur-maire FLAISSIÈRES et tout le conseil municipal, la plupart des membres du conseil général et les chefs des services de la mairie. Une "affluence considérable" était venue, d'après l'article.
Le discours du maire fut une longue suite de compliments:
"homme politique ardent, convaincu, plein de loyauté courageuse, plein de haute droiture", il "était une conscience, il ne connut jamais la peur, sa pensée resta libre sous le seul contrôle définitif de sa froide raison".
Ces obsèques avaient été annoncées comme "purement civiles". Cela correspondait bien aux idées du défunt. La tête du cortège, avant même le corbillard, était formée par les Amis de l'Instruction Laïque de la Blancarde, la Libre Pensée de Saint-Antoine et la Libre Pensée du groupe Anatole-de-la-Forge. Parmi les délégations présentes, il était signalé celle du groupe antireligieux Le Chêne.
Ensuite, le cercueil fut "placé au dépositoire en attendant qu'on le transporte dans son pays natal", c'est-à-dire à Guagno.
Trois ans plus tard, le 15 janvier 1924, à la demande du groupe socialiste, le conseil municipal décida de donner son nom à la place, au début du boulevard de la Blancarde, pour l'aménagement de laquelle Philippe CERATI s'était dévoué.
Mais qui peut imaginer aujourd'hui, parmi les enfants (et leurs parents) qui s'amusent ici, que cet homme a existé et qu'il a eu une quelconque importance? Et qui, parmi eux, connaît Sorrù in Sù?