Comme souvent, le toujours très intéressant mensuel interparoissial "INSEME" de décembre publie un article historique sur les Deux Sorru. Cette fois-ci , Bernard ALLIEZ porte son regard sur une chapelle abandonnée depuis longtemps. Elle se trouve "sur la route de Chigliani à Letia, à quelques centaines de mètres du pont de la Catena, entre deux vallons, (...) entre la route et le fleuve Liamone." Il précise: "Le lieu est nommé sur les cartes d'état-major, "villa"".
Sur la carte au 1/25.000 que nous reproduisons, ce mot est encerclé de rouge.
Merci à Bernard ALLIEZ pour faire connaître l'existence de cette édifice. Mais, pour en comprendre l'histoire, l'auteur donne plusieurs hypothèses dont deux méritent une remarque:
1 - Il donne à cette ruine une identité pisane du XIIème ou XIIIème siècle "comme en témoigne son orientation vers l'est". Mais toutes les églises sont placées ainsi. La coutume de placer le chœur face au soleil levant, symbole de résurrection, avait commencé, semble-t-il, en Grèce, Asie Mineure et Afrique du nord, avant le Vème siècle et était devenue une règle quasi générale aux XIème-XIIème siècles. A Poggiolo et Guagno-les-Bains, les trois édifices catholiques (voir article de H. et P. DUBREUIL) ont cette orientation.
2 - Bernard ALLIEZ se demande également pourquoi le lieu a été abandonné et se demande si l'abandon ne serait pas "la suite de la politique de "dezabitationne" après la guerre de Sampiero Corso". Il y a là confusion entre deux événements. La "guerre de Sampiero" se déroula entre 1564 et 1569. Le chef militaire voulait libérer la Corse de la tutelle génoise. Il échoua et mourut dans une embuscade. Son échec ne provoqua pas de représailles plus graves que dans des périodes de guerre habituelles. Par contre, la politique de destruction et de déportation avait bien été pratiquée au siècle précédent. Elle est bien résumée par Xavier PAOLI dans son "Histoire abrégée du village avant 1914":
"A la fin du XV°, la défaite des Cinarchese Giovan Paulo et Ranuccio da Leca face aux Génois de l'Office San Giorgio donna l'occasion à ceux-ci de se débarrasser de façon radicale d'une résistance qui les exaspérait. En 1489, le commissaire génois Ambroggio de Negri fit détruire et incendier les maisons et déporter dans le Celavo et en Cinarca la population de la piève."
François PAOLI, qui a publié cet été 2011 "Letia et la région de Vico dans l'histoire de la Corse", consacre lui aussi quelques lignes à cet endroit (pages 17 et 18). Il écrit que "cette très jolie petite chapelle romane" s'appelle aussi Sant'Isaïe.
"Elle est malheureusement en ruines, avec seulement sa partie basse en pierres taillées à la façon de l'époque pisane, et a été partiellement remontée à hauteur d'homme plus tard. On peut penser que sa vocation était intercommunale, entre les populations de Vico, Letia, Murzo et éventuellement Renno."
Qu'est-il donc vraiment arrivé à Saint Césaire de LETIA? Ces pierres ont encore bien des secrets à révéler.