Le docteur Louis DEFRANCHI fut le premier médecin affecté à la station des Bains de Guagno en 1808 (voir l'article précédent). Il ne fut peut-être pas très bien payé mais il remplit son rôle très consciencieusement.
Le décret de nomination de DEFRANCHI et de son collègue LECA (pour l'arrondissement d'Ajaccio et de Sartène) date du 18 août 1808. Le document fut envoyé en Corse avec une lettre signée par le Ministre de l'Intérieur Emmanuel CRETET et datée du 5 septembre.
Le préfet du Liamone, siégeant à Ajaccio, était invité par son supérieur "à donner aux deux médecins les instructions nécessaires pour les mettre en état de remplir les fonctions qui leur sont confiées". Nommés par l'empereur, ils devaient obéir à l'Etat.
La lettre comprenait une seconde partie, plus longue, concernant l'aspect financier. Les médecins inspecteurs des eaux thermales recevaient normalement un traitement "imputé sur le produit des eaux". Mais, en Corse, "les eaux minérales (...) ne sont d'aucun revenu".
Le ministre proposait donc de trouver sur différents budgets les sommes nécessaires aux "gratifications (qui ne) devront avoir d'autre objet que d'indemniser les inspecteurs de leurs déplacements et des soins qu'ils auront donné aux malades indigents et aux militaires, attendu qu'ils pourront se faire rétribuer par les personnes aisées dont ils auront dirigé le traitement".
Les riches peuvent payer.
Louis DEFRANCHI retira-t-il de grosses sommes avec cette activité? Nous ne le savons pas. En tout cas, il remplit sérieusement ses fonctions. Il rédigea même, dix ans plus tard, un rapport très complet qu'il transmit au préfet de la Corse le 28 novembre 1818 (il y a deux cents ans).
Dans ce texte de seize pages, entièrement rédigé en italien, accompagné d'une lettre au préfet de trois pages, également en langue italienne, Louis Mathieu GENTY, auteur de "Acqua médicinale", a pu retenir:
1) que le médecin a compté durant la saison 1818, de juin à septembre, 2245 baigneurs militaires et paysans.
2) Par ailleurs, il a observé trois cas remarquables de guérison:
- "un soldat, qui avait la jambe droite rigide et paralysée, a pu, en se baignant à la source "Soccia" et par des lavages, en 16 jours recouvrer l'usage de son membre".
- "Une femme de 18 ans qui souffrait d'aménorrhée, manque d'appétit, vomissement, en prenant durant 12 jours un bain le matin, suivi de l'absorption d'un litre et demi d'eau, bain le soir, éprouva une très sensible amélioration".
- "Une femme de 35 ans qui avait de grandes difficultés à se nourrir, à se tenir sur ses pieds et même à soulever des poids légers, ayant pris pendant un an un bain par jour à 27° Réaumur; et l'année suivante 2 bains par jour à 32°, et ce pendant 12 jours, put se promener sans être soutenue"...
3) Enfin, le médecin estimait que ces avantages, et la multitude des baigneurs annuels, devaient retenir l'attention du gouvernement.
C'était voici deux siècles, dans un monde différent...