Une erreur visible par tous et qui n'est pas rectifiée devient une vérité. Il faut la rectifier au plus tôt. Mais encore faut-il se rendre compte de la contre-vérité.
Le conseil général de Corse-du-sud a fait installer des pupitres d'information dans les villages de Sorru in Sù en octobre 2015. Pendant l'été, les touristes, avides de renseignements sur cette région si particulière, s'arrêtent pour les lire. Par contre, les habitués des lieux n'y ont pas particulièrement attaché d'importance. Et c'est là leur erreur...
Dans ce blog, plusieurs erreurs et approximations concernant Poggiolo et Guagno-les-Bains avaient été relevées.
Mais les panneaux de Soccia auraient dû être examinés car une même grosse erreur se trouve deux fois.
Lisez le texte placé devant la mairie puis celui du lutrin qui est un peu plus loin, à la bifurcation de la route faisant le tour du village. Cliquez sur les images pour bien lire.
Voyez-vous le problème?
Les éminents lecteurs habituels du Blog des Poggiolais n'ont aucune difficulté à trouver l'erreur, tant elle est manifeste:
Il est écrit par deux fois que san Marcellu était église piévane et que, après son abandon, ce rôle fut rempli par l'église paroissiale de Soccia.
Rien de plus faux !
Une église piévane était l'église principale de la pieve. Pendant longtemps, au Moyen Age, les baptêmes ne se déroulaient que dans ce bâtiment, même si des églises secondaires et des chapelles existaient dans le même territoire. Le lieu servait aussi de siège à l'assemblée qui attribuait les pâturages collectifs et de tribunal local (renseignements trouvés sur Wikipedia).
Pour Sorru in Sù, l'église piévane fut au Xème siècle Sant'Anorilla ou Sant'Anarilla, aux Trois Chemins, entre Poggiolo et Soccia.
L'archéologue Moracchini-Mazel en avait trouvé quelques pierres dont une a été retrouvée en 2013 par Noelle MEDURIO et Anna-Maria LECA dans le cadre de leur recherche sur le patrimoine bâti des Deux-Sorru (voir le compte-rendu ICI).
Cette église fut remplacée, peut-être au début du XVIème siècle, par Saint Siméon de Poggiolo.
Quant à San Marcello, elle n'a jamais été qu'une chapelle, édifiée peut-être à cause de la présence d'une source qui coule toujours près de la route. En dehors de quelques pierres éparses, il reste un vestige important: le triptyque peint sur bois à la fin du XVème et représentant la Vierge à l'enfant entourée de saint Marcel et de saint Pierre, classé monument historique depuis 1957. Or, le texte de présentation placé sous cette peinture dans l'église de Soccia indique bien qu'elle se trouvait "dans une modeste chapelle située non loin du village au lieu dit "San Marcello" dont les vestiges ont pratiquement disparu aujourd'hui".
Questionné en août dernier, Jean-Baptiste PAOLI, le spécialiste de l'histoire socciaise, nous a confirmé l'impossibilité que San Marcello ait jamais été église piévane.
A Soccia, l'église Santa Maria delle Gratie était une simple chapelle installée au XVIème siècle. Elle devint paroissiale en 1713, avec autorisation par l'évêque de Sagone d'ouvrir des registres paroissiaux.
L'église de Poggiolo resta piévane jusqu'en 1781, année où l'évêque choisit celle de Guagno. Mais le curé poggiolais s'y opposa jusqu'à la fin de la Révolution.
Il est inutile de chercher quel est l'auteur de cette bourde mais il est indispensable de ne pas la laisser perdurer.
Elle risque de devenir vérité officielle, tout comme le mythe des séances de cure thermale de Napoléon III et de l'impératrice Eugénie à Guagno-les-Bains.
Nos villages ne méritent pas une Histoire travestie.
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