Tout comme l’église Saint Siméon domine le village de Poggiolo, la chapelle Saint Antoine domine les maisons de Guagno-les-Bains. Mais depuis combien de temps ?
A l’origine, à la bifurcation des routes allant maintenant (car elles n’eurent pas le même tracé avant la fin du XIXème siècle) d’Ajaccio vers Soccia et vers Guagno, il y eut un monaccia, un petit ermitage de moines cordeliers. Mgr MASCARDI, dans la relation de sa visite apostolique de 1587, décrit un oratoire dédié à Saint Antoine abbé et une maison au sol de terre pour l’accueil des pauvres et des voyageurs.
Ce lieu était protégé par le curé de Saint-Siméon de Poggiolo (pétition du maire de Soccia citée par Louis Mathieu GENTY dans « Acqua medicinale », annexes 4 et 5).
Un ermite, le Père Jean, voulut que chacun put profiter des bienfaits de l’eau chaude qui jaillissait de la montagne et qui était déjà mentionnée par le chroniqueur Antone Petru FILIPPINI en 1594. Il arriva, en quêtant de maison en maison, à amasser la somme nécessaire pour la construction (entre 1709 et 1711) de trois bassins en granit pour les hommes, les femmes et les moines. Cette initiative préfigura l’établissement thermal.
Le 25 juin 1728, Mgr GIUSTINIANI, évêque de Sagone de 1726 à 1741, recommanda quelques travaux d’amélioration et ajouta que «l’ermite doit porter un habit propre aux ermites, se laisser pousser la barbe et se couper les cheveux». Il donna au chanoine Ilario GUAGNO l’autorisation de faire la quête dans tout le diocèse afin de doubler en planches le sol de la maison. Selon certaines sources, Ilario serait le grand-père ou l’arrière-grand-père du bandit Théodore POLI.
La Révolution Française supprima tous les couvents cordeliers en 1790. L’ermitage et sa chapelle furent abandonnés.
Le sanctuaire fut sauvé par le conseil général du département du Liamone qui, «dans sa séance de 1807 (…) avait voté l’application du produit de quatre centimes additionnels pour le rétablissement de l’ancienne chapelle de Saint-Antoine» (François VAN CAPPEL de PRÉMONT, «Guagno-les-Bains à travers la petite histoire du thermalisme», p. 94). La commune de Guagno, qui considérait la source comme une propriété guagnaise, y ajouta son propre financement et reconstruisit le bâtiment religieux en 1809 (Louis Mathieu GENTY dans «Acqua medicinale», annexe 26).
Le culte y reprit à partir de 1810.
Construit ensuite, l’hôpital militaire lui fut accolé, comme le montre le cadastre de 1857. La chapelle correspond à la parcelle 169, coloriée en bleu et cerclée en rouge. H.M. signifie Hôpital Militaire et E.T. Etablissement Thermal.
Dans la reconstitution ci-dessous, réalisée d’après le plan COTIN de 1838 (François VAN CAPPEL de PRÉMONT, «Guagno-les-Bains à travers la petite histoire du thermalisme», p. 116), Saint-Antoine est le numéro 4 (3 pour l’hôpital militaire).
Maintenant que cet hôpital n’existe plus, la chapelle est seule sur la plate-forme qui surplombe la vallée du Fiume Grosso.
Le bâtiment a connu quelques modifications depuis deux siècles. Ainsi, on peut comparer :
1-la carte postale de la visite des scouts de Menton dans les années 1930
2 - et une photo de l’été 2015
Entre les deux, les murs ont été crépis, un compteur électrique a été installé, la façade décorée de bandeaux blancs et une croix érigée au sommet.
Quelle que soit l’apparence de la chapelle, l’abbé au cochon protège toujours Guagno-les-Bains.