Le texte ci-dessous a été rédigé par Philippe OTTAVI au nom de l'association Ambiente di u Pumonte, créée en 2016 à partir du Collectif per u Pumonte Pulitu à l'origine de la fermeture du centre d'enfouissement de Vicu. Ce document tente d'expliquer la nouvelle crise des déchets que nous subissons.
Ce point de vue est une tribune libre qui n'engage pas le Blog des Poggiolais. Il peut ne pas être partagé par tous nos lecteurs qui peuvent réagir s'ils le désirent.
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Novembre 2019, blocage du centre d’enfouissement de Vighjaneddu.
“Triez !”.
Cette injonction, ce cri du SYVADEC, de la CAPA et d’autres communautés de communes signe l'échec total de la méthode de tri-collecte employée sur plus de 90% du territoire de la Corse. Elle s’opère essentiellement par les conteneurs des points d’apports volontaires (PAV) disséminés dans nos villes et nos campagnes. Le tri plafonne à 30% de matières (ou flux) recyclables et les tonnages à enfouir représentent toujours près de 70% des déchets ménagers. Et ça déborde !
Les chiffres du SYVADEC du 1er semestre 2019 montrent une performance de tri de recyclables de 15% seulement par la collecte en points d’apports volontaires (PAV). Il reste donc pour ce type de collecte, 85% de résiduels à enfouir (déchets non inertes en mélange, potentiellement polluants). Pour les apports en déchetterie, le tri de recyclables atteint 85% de recyclables. Mais au total pour ces deux modes de recueil ce sont bien 70% de déchets qu’il faut enfouir, le tri global des recyclables plafonnant à 30%. La collecte en points d’apports volontaires (PAV) est bien un échec total. Comme il n'est pas possible que chacun apporte en déchetterie à plusieurs kilomètres de son domicile l’ensemble de ses déchets bien triés, il faut impérativement changer la méthode de la collecte.
Et pourtant…
Depuis la fermeture de Tallone en juin 2015 puis celle de Vicu en mars 2017, compte tenu des deux capacités réglementaires, l’une annuelle et l’autre totale, du tonnage des résiduels à enfouir dans chaque site restant, il était facile de prévoir qu’il fallait impérativement augmenter très rapidement le taux de tri des recyclables qui n’était que de 20% en 2015 pour réduire les tonnages à enfouir, éviter la saturation des sites et l’exaspération montante des populations riveraines.
Or...
La méthode Zéro Déchet fait la preuve de son efficacité partout où elle a été mise en place avec obtention de taux de tri dépassant les 60% dès la fin de la première année. Outre les mesures de réduction des déchets à la source et les mesures de réutilisation et de réemploi, cette méthode repose sur 3 points :
- Le tri à la source (à la maison) des recyclables dont celui des fermentescibles qui à eux seuls représentent environ 30% des déchets ménagers,
- La collecte de contrôle des différents flux, de préférence en Porte à Porte, La Tarification Incitative assise sur le poids du résiduel.
- A moyen et long terme, les coûts de fonctionnement de la méthode Zéro Déchet restent les plus bas.
Malgré cela….
Les collectivités responsables de la gestion des déchets, mairies, puis à partir du 1er janvier 2017 (Loi Notre) les communautés de communes, se sont obnubilées à disperser sur l’ensemble du territoire des conteneurs d’apports volontaires (PAV) et pour certains (CAPA et CAB) à lancer des études coûteuses sur des procédés industriels très lourds en investissements et en fonctionnement et moins fiables que le tri à la source (à domicile et gratuit !) de la méthode Zéro Déchet. Après plusieurs années, ces études n'ont toujours pas abouti.
Et pourtant...
Les recommandations, réglementations, lois, jurisprudences, imposent le respect de la hiérarchie des méthodes ;
d'abord, trier au maximum,
traiter les fermentescibles au plus près de leur zone de production,
favoriser la réutilisation et le réemploi (recycleries),
et parallèlement réduire à la source les déchets.
Sur un résiduel minimisé au maximum, à 25, 20, voire 15% des déchets ménagers, envisager alors des processus industriels de tri dont le calibrage et donc les coûts seraient très fortement minorés. Ils permettraient de réduire encore le résiduel. Pour un tri de 80% le résiduel à traiter dont une petite partie resterait à enfouir serait de 45 000T par an au lieu des 165 000T qui sont actuellement enfouis.
Et enfin...
Le rural ne cesse d'affirmer qu'il n'a pas vocation à rester le dépotoir de l’urbain.
Les solutions industrielles massives requièrent des investissements très lourds et donc les retours sur investissement. Ceux-ci bloquent toute évolution progressive du tri pour pérenniser le maintien de leur quantité de matières premières indispensables à leurs fonctionnements.
Elles imposent des transports longs et massifs, forcément coûteux et polluants.
Elles continuent malgré les progrès techniques à générer des pollutions gazeuses, liquides et solides importantes : TMB (tri mécano-biologique), Incinérateur, CSR (combustibles solides de récupération)
Au total
Que de retard perdu !
Que d’argent gaspillé !
Que d’exaspération de l'opinion publique !
Il est indispensable de passer très rapidement à la méthode Zéro Déchet et suivre la dynamique des centaines de territoires qui, en France et en Europe, sont déjà opérationnels depuis des années.