Ce titre est celui d'un article publié dans "INSEME" du mois de mars.
Le 3 janvier dernier, les résultats du dernier recensement de population de l'Insee faisaient
la Une de Corse-Matin, car avec 13,04% de hausse, la Corse est championne nationale du développement démographique.
Chouette ! pense-t-on brièvement, même si, intuitivement, on se doutait bien qu'il y avait plus d'habitants dans le grand Ajaccio : les nouvelles résidences se sont multipliées
en ville et alentour, la rocade est aussi engorgée que les autres axes qu'elle était censée fluidifier, et il est désormais impossible de se garer en ville !
Et puis on se précipite sur le tableau qui donne les chiffres par commune. Et c'est là que le bât blesse : dans le canton des Deux-Sorru, chaque village (excepté Balogna et Poggiolo), affiche une hausse de population sur la dernière décennie. Pour tous ceux, et ils sont légion, qui se livrent au
passe-temps classique qui consiste à passer en revue chaque maison occupée, quartier par quartier, pour dénombrer le nombre exact de résidents du village, le verdict est imparable: les chiffres
Insee sont faux, et, dans tous les cas, surévalués.
On savait bien que ni le nombre de votants inscrits sur les listes municipales, ni le nombre d'abonnés au téléphone, ne reflétaient la réalité de la population permanente.
L'Insee, en réalisant tous les 8/9 ans un comptage traditionnel et systématique sur toute la population, était censé donner des chiffres fiables. Mais l'Institut a changé de méthode, organisant
depuis 2004 des enquêtes annuelles tournantes sur un échantillon de population, qui offrent l'avantage d'actualiser les données chaque année, mais entraînent sans doute une marge d'erreur.
Reste encore qu'on peut observer 2 niveaux dans la population d'un village : celui qui se limite aux « purs et durs » qui y résident effectivement toute l'année,
et un niveau qui inclut ceux qui le désertent au coeur de l'hiver (6 mois au plus) et ceux qui se partagent chaque semaine ou chaque mois entre le village et la ville au gré de leurs envies. Si
on inclut cette population mouvante qui ne peut pas être considérée comme des vacanciers, on s'approche davantage des données Insee.
Un chiffre d'autant plus important que la vie des communes est tributaire des « populations légales », notamment pour déterminer le nombre de conseillers municipaux,
établir les règles de constitution de communautés de communes, et surtout pour obtenir leur dotation globale de fonctionnement (DGF). Là encore, on peut considérer que la méthode Insee qui
conditionne la dotation de l'État, et donc l'aisance financière des communes, est à revoir, comme le soulignait récemment Joselyne Mattei-Fazi, maire de Renno (88 hab.) : « pendant plusieurs
semaines, 800 personnes séjournent sur ma commune. C'est ce chiffre que je vais retenir pour dimensionner les réseaux d'eau et d'assainissement et pour l'ensemble des équipements structurants !
»
Une dernière observation : dans tous les villages, combien de maisons semblent à l'abandon, voire au bord de la ruine, alors qu'il y a de nombreuses demandes pour acheter ou
louer qui restent sans solution. A Poggiolo, aucune maison n'a été revendue depuis 10 ans.
Combien sont-ils, parents, amis, corses pour la plupart, désireux de revenir au village, et qui ne trouvent pas à se loger ?
Pascale Chauveau et le comité de rédaction