En titrant aujourd'hui "La Corse dit adieu à l'homme du Parc", le journal "Corse-Matin" insiste sur l'activité principale de
Jean-Luc CHIAPPINI et sur l'ampleur du choc ressenti par sa mort. Il aurait pu écrire également: "Jusqu'à quand?". Oui, jusqu'à quand la Corse va-t-elle passer son temps à aller d'un assassinat à
un enterrement? Jusqu'à quand la Corse va-t-elle continuer à voir les projets d'amélioration de l'île emportés par les coups de feu? Jusqu'à quand la Corse sera-t-elle soumise aux appétits
suscités par l'argent? Jusqu'à quand la police et la justice seront-elles paralysées? Jusqu'à quand le gouvernement croira-t-il que visites ministérielles et beaux discours servent à quelque
chose?
Texte du reportage de l'AFP sur les obsèques de Jean-Luc CHIAPPINI:
Un millier de personnes ont assisté lundi dans son village de Letia (Corse-du-Sud) aux obsèques du président du Parc naturel régional de la Corse (PNRC) et maire de la ville, Jean-Luc Chiappini,
assassiné jeudi dernier à Ajaccio.
Le président de l'Assemblée de Corse, Dominique Bucchini, le préfet de région, Patrick Strzoda, et des dizaines d'élus, dont le député (UMP) Camille de Rocca Serra et le sénateur (PRG) Nicolas
Alfonsi, ont assisté à la cérémonie dans l'une des deux églises de Letia.
Le cercueil de Jean-Luc Chiappini a traversé le petit village de montagne, porté jusqu'à l'église Saint-Martin par des agents du PNRC vêtus de noir.
Des jeunes femmes, également employée du Parc, tenant chacune une rose blanche à la main faisaient une haie d'honneur à leur président devant l'édifice religieux.
Durant la messe, en corse et en français, le père Jean-Pierre Bonnafoux, ancien curé de Vico, le village voisin, a appelé au "respect de l'autre et de la vie humaine" dans "un monde de tapage" et
déploré "la situation dramatique que vit la Corse".
A l'issue de l'office religieux, M. Bucchini a dénoncé dans une allocution devant la petite église de granit gris, "la violence insinuée dans tous les domaines de la vie quotidienne" dans une île
"plongée dans une spirale de meurtres".
Stigmatisant "l'argent facile et les appétits criminels", il a toutefois exprimé sa "confiance" dans l'État, alors que Jean-Luc Chiappini est la dixième victime d'un homicide depuis janvier, pour
assurer la sécurité d'une "population qui ne veut plus être prise en otage".
Réaffirmant "la volonté de ne pas consentir à cette violence", le préfet Strzoda a rappelé les engagements du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, et du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, peu
après l'assassinat du notable, de "tout mettre en oeuvre pour arrêter les auteurs de ce crime" et de "faire rempart à cette barbarie".
Toutes les mairies de Corse-du-Sud étaient fermées lundi en signe de deuil et les drapeaux avaient été mis en berne.
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La nièce de Jean-Luc Chiappini prononce un discours au cours de ses funérailles, à Letia, le 29 avril 2013 - Photo de Pascal Pochard Casabianca - AFP © 2013 AFP
La présidente de l'association des maires du département, Joselyne Fazi, elle même premier magistrat d'un village de montagne voisin, a exprimé sa "colère face à la
violence qui n'est pas une fatalité". Elle a déploré "qu'aucun assassinat d'élu n'ait été élucidé" en Corse.
"Ce que nous savons c'est que nous sommes les victimes et que plus que jamais nous avons besoin de l'État pour assurer la sécurité", a ajouté Mme Fazi. Elle
répondait ainsi à l'appel lancé par Manuel Valls à la population corse, après l'assassinat de Jean-Luc Chiappini, pour "l'aider" dans la chasse aux criminels.
Ancien instituteur et maire de Letia depuis 1977, le président du PNRC depuis 1995, a été tué de trois balles dans la tête jeudi dernier au volant de sa voiture
alors qu'il revenait d'un voyage à Paris.
Le commando de tueurs en scooter qui l'a exécuté sur la route de l'aéroport d'Ajaccio est parvenu à s'enfuir.
Le dossier sur ce troisième assassinat de notable en six mois, après ceux de l'ancien bâtonnier de l'ordre des avocats, Antoine Sollacaro, et du président de la
Chambre de commerce et d'industrie de Corse-du-Sud, Jacques Nacer, a été confié à la Juridiction interrégionale spécialisée de Marseille (Jirs, chargé des affaires de grand banditisme).
A l'exception d'un règlement de comptes de nature purement privé, les enquêteurs, qui ont retrouvé une arme de poing dans la boîte à gants de la voiture de la
victime, n'excluent aucune piste.
Ils examinent notamment les dossiers traités par le président du PNRC, où il dirigeait 110 agents et passait des marchés publics, ainsi que ceux de la mairie de
Letia et de le la communauté de communes du canton des Deux Sorru que présidait également Jean-Luc Chiappini, a-t-on indiqué de source proche de l'enquête.