Faure
Gnassingbé a été réélu président du Togo pour un second mandat, selon les résultats provisoires communiqués samedi soir par la Commission électorale nationale indépendante (Céni),
avec 60,92% des voix (1.243.044). Cette victoire, quelles que soient les réserves qui peuvent être émises sur sa régularité, est également celle de Charles DEBBASCH,
conseiller spécial du Président, qui a rang de ministre. Ce juriste français avait déjà conseillé le précédent Président, le général Eyadema, et il a été l'instigateur de la contorsion constitutionnelle
qui avait permis à Faure Gnassingbé de succéder à son père en 2005.
Charles DEBBASCH a un curriculum vitae impressionnant (que l'on peut voir sur son blog http://charlesarthur.space-blogs.com/). Il est surtout connu comme professeur de Droit et comme Président de l'Université
d'Aix-Marseille III dont il avait obtenu la création de haute lutte dans les années agitées d'après-mai 68. Il a également été à la une de nombreux journaux pour ses ennuis judiciaires concernant
la gestion de la Fondation VASARELY à Aix-en-Provence.
Enfin, il connaît bien
la Corse, et surtout notre canton, car il a été marié avec Marie-Hélène OTTAVY, originaire de Soccia. Beaucoup se souviennent peut-être d'avoir vu le couple (avec son chien
yorkshire) à la salle des fêtes pour le 15 août ou à la foire de Renno où le doyen honoraire dédicaçait ses livres. Les obsèques de Marie-Hélène avaient frappé par le grand nombre de belles
voitures remplies de personnalités togolaises qui avaient grimpé jusqu'à l'église de Soccia.
Pourquoi l'évoquer sur le blog de Poggiolo? Pas par curiosité malsaine mais pour donner le texte suivant extrait d'un de ses livres (et republié dans son blog). En dehors de la critique du passéisme des nationalistes (dont on peut penser ce que l'on veut), il y a là une description des paysages des Deux-Sorrù,
des faux espoirs de Guagno-les-Bains et des changements dus à la modernité.
[10/08/2007 11:03] LE PROBLEME CORSE |
LE PROBLEME
CORSE
CERVEAUX DECHIRES
je publie à nouveau ce texte écrit en 2003 et qui a gardé toute son actualité
LES FLAMBEAUX DE CONTINUITE
Le lendemain, il n’était plus question de paroles mais de réalités. Je m’étais enfoncé dans la
vallée de Vico. J’avais quitté les roseaux marécageux et les eucalyptus enivrants et je m’étais engagé dans la plaine puis dans la montagne. Lacet après lacet, je m’évertuais à rejoindre ma
cible. Impatient et téméraire, je forçais quelque peu sur l’accélérateur pour atteindre plus vite mon but. La nature se faisait plus sauvage. Les chênes verts s’étaient teintés de noir et
dessinaient des ombres inquiétantes. Trois sangliers égarés veillaient la dépouille de l’un des leurs qui avait voulu se frotter de trop prés à la civilisation automobile. Puis Soccia
apparut, sorte d’île dans ce cirque de montagnes majestueux. Les pierres stables et ardentes de monotonie et le village pareil à lui-même donnaient l’impression de l’immobilité. Et, pourtant, je ne pouvais m’empêcher, en progressant dans une lente procession dans
les rues en colimaçon du village, ébloui par la majesté des massifs environnants, de ressentir des idées contradictoires s’entrechoquer dans mon esprit.
LES CHOCS DU CHANGEMENT
Vingt ans après, l’établissement thermal a poussé mais sur le terrain d’un voisin. Les touristes n’ont pas suivi. Le Tonton flingueur est relié au monde par satellite et il peste de voir son village dépérir. Les jeunes délaissent les maisons familiales pour aller s’installer plus prés des plages. La société de consommation est passée par là et lors de la fête patronale les rythmes américains ont remplacé les ritournelles corses. Voici les jeunes gagnés par la mondialisation. Ils achètent des fringues estampillées. Ils se coiffent comme leurs idoles américaines . Ils jouent sur des playstation et rêvent de la guerre des étoiles numéro dix. Les couples se font et se défont à un rythme que les parents n'arrivent plus à suivre et les enfants du divorce rejoignent les grands-parents plus souvent que de raison. Quelle place pour l’identité dans ce déferlement de modernité, dans cette ouverture si grande sur le monde qu’elle déchire les linteaux des anciennes fenêtres? Le cimetière des corsitudes abandonnées serait grand ouvert et le vent du grand large emporterait les derniers vestiges d’une authenticité disparue. Comme s’il suffisait de lustrer les feuilles dentées des châtaigniers pour faire disparaître la mémoire de leurs racines ! Car d’autres tendances encore plus profondes se font jour.
Les civilisations sont rebelles à la mort. Quand elles sentent celle-ci se rapprocher, elles se réveillent et engagent le combat contre le virus assimilationniste. A toi, l’anglais triomphant de ton universalité, à toi le français subtil et tourmenté, j’oppose la langue corse variée de ses patois mais lieu géométrique de la reconnaissance d’une identité. A toi le cosmopolitisme universaliste, j’oppose la trame des origines, la loi du sang. Et à chacun de se découvrir plus corse que son voisin, corse de l’intérieur contre corse de l’extérieur, corse de souche ou d’adoption, de mère ou de père. A toi le capitalisme, j’oppose le respect de la tradition, la paix des rivages, le droit du peuple à sa terre. A toi le citoyen du monde, découvreur des horizons lointains, je réponds par ma volonté de vivre et mourir au pays.
Ainsi , il y aurait deux logiques, l’une de l’enfermement et de l’isolement, l’autre de l’ouverture. Corses isolés dans leur île ou île plongée dans le tourbillon universel des Corses de partout et d’ailleurs. Une île pour les Corses ou des Corses dans leur île. Débat source de haines irréductibles, de combats fratricides, de morts inutiles, de paillotes brûlées par de prétendus gardiens de la loi.
Ainsi devisait mon interlocuteur. Je lui répondis :
« Rassurez-vous les choses sont plus compliquées qu’il n’y parait. Il n’y a pas une ligne de démarcation entre ces deux univers , une frontière qui sépare deux clans. La ligne de fracture est à l’intérieur même des cerveaux qui adhèrent à ces deux conceptions à la fois. Il ne devrait pas être bien sorcier de réconcilier ces neurones égarés. »
|