La fin du poème drolatique de MAISTRALE sur la procession de Soccia (voir ICI) est un peu mystérieuse voire même incompréhensible.
Condamné à une amende, MATTONE s'écrit
Cusì vidu in prucissione
À San Roccu in lu stagnone !
"Jeannot" PAOLI avait traduit ces deux vers par:
Ainsi je vis en procession
Saint Roch dans le bidon ! (?...)
Traduction mot à mot car elle lui avait donné beaucoup de fil à retordre. Il avait montré cette difficulté par le point d'interrogation et les points de suspension mis entre parenthèses à la suite du dernier vers.
Le Poggiolais Jean-Baptiste PAOLI, qui a revu cette version, a fait de même mais il a ajouté en commentaire que cette expression peut être traduite par:
j'en ai vu de toutes les couleurs.
En tout cas, pourquoi est-il question de saint Roch et d'un bidon?
Cette allusion au protecteur de Poggiolo se trouve dans certains textes. Par exemple, dans les colonnes de "La Corse, Mon Hebdo" du 30 avril 2010.
Dans le cadre du dictionnaire français-corse qu'il remplissait alors semaine après semaine, l'écrivain Ghjuvan-Ghjaseppiu FRANCHI, ancien directeur de la revue RIGIRU, en était arrivé au verbe "baver" qui, de façon familière, donne l'expression "en baver" et "en faire baver à quelqu'un" qui se dit : "falli vede a San Roccu in lu stagnarone". Littéralement : "lui montrer Saint Roch dans un récipient étamé".
Pour comprendre cette curieuse expression, le rédacteur citait l'explication donnée par le grand universitaire Fernand ETTORI (1919-2001) dans son ouvrage: Anthologie des expressions corses, éd. Rivages, Marseille, 1984.
"Aux fêtes patronales, arrivaient des ermites portant sur la poitrine, suspendu au cou, une sorte de petit cadre en bois dans lequel était exposée, sous verre, l'image du saint qu'ils servaient, le plus souvent saint Roch. Ces cadres s'appelaient "paci" (paix); d'où le nom de "paciaghji" (porteurs de paix) donné dans le sud de la Corse à ces ermites qu'on appelait ailleurs "rimiti".
Moyennant aumône, chacun était admis à baiser l'effigie du saint, tandis que l'ermite effaçait, à chaque fois, avec un chiffon la trace des lèvres. On glissait l'aumône dans une sorte de tronc en fer blanc appelé "stagnalonu" par analogie avec le seau du même nom.
Vénérer ainsi saint Roch était gage de prospérité, mais si quelque jeune impertinent faisait mine d'esquiver l'aumône, l'ermite, furieux, menaçait de le prendre par les cheveux et de lui plonger la tête dans le bidon pour lui faire voir saint Roch".
Voir saint Roch dans le bidon était donc employé pour évoquer un moment difficile.
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