"On est sur la piste du bandit SPADA", claironna LE PETIT PROVENÇAL dimanche 15 novembre 1931.
En fait, rien de concret n'était livré. Le fait important consistait en l'arrestation à Guitera, donc loin du domaine de SPADA, du colosse Mathieu FRASSATI (2,10m et 140 kilos!), accusé d'avoir aidé BORNEA.
JUSTICIER OU ASSASSIN?
Ce même jour, le quotidien socialiste publia en première page une photo de l'industriel SIMONETTI qui venait de tuer le bandit BARTOLI.
Il pose souriant avec un fusil dans les mains. Il semble heureux de son titre de gloire. Il est vrai que la presse favorable à la démonstration de force de l'Etat lui a souvent donné le beau rôle: celui du justicier. Mais il est un peu paradoxal de donner comme exemple aux lecteurs continentaux l'utilisation de la force que l'on condamnait chez les Corses.
Le "justicier" sourit également dans le film d'actualités réalisé à ce moment-là.
SIMONETTI n'eut absolument aucun souci avec la justice alors que son "exploit" n'était pas de la légitime défense mais ressemblait plutôt à un assassinat programmé. Il n'est pas étonnant que les communistes le mirent plusieurs fois en accusation, comme exemple de la "justice bourgeoise".
UNE SCÈNE VRAIMENT AMUSANTE ?
Sur un mode plus léger, la même édition du quotidien marseillais, toujours en page 1, montrait une voiture de police bloquée par un âne. On voulait montrer que tout n'était pas noir et que l'on pouvait voir en Corse "une scène amusante".
La caricature de S’Tick publiée en page 2 était dans le même esprit.
Seulement, le journal ajoutait que la «scène amusante» avec l'âne se plaçait "dans un village occupé". Ce dernier mot annule le sentiment que l'on pouvait ressentir au premier regard.
Le "bourrage de crânes" avait eu là un petit raté.
LES COLONNES INFERNALES DE L'HUMANITÉ
Pendant ce temps, les communistes ne décoléraient pas.
L’HUMANITÉ titra le 15 novembre: "Tandis qu'on traque Bornéa, l'opinion de l'île s'émeut de l'action des "colonnes infernales".
Il est piquant de relever que le journal communiste utilise, pour condamner leurs activités, le terme de "colonnes infernales". En effet, les colonnes infernales étaient les opérations menées par les armées républicaines du général TURREAU lors de la guerre de Vendée (1793 - 1796), afin de détruire, par les moyens les plus brutaux, les dernières troupes vendéennes royalistes et les populations qui les recevaient.
En tout cas, cet article signalait quelques arrestations mais insistait sur l'hostilité des Corses à toute coopération avec la police. Sa conclusion était:
"Pour nous, notre opinion se confirme de jour en jour: les opérations actuelles n'ont pas été dictées par une volonté "d'épuration" qui se serait aussi bien manifestée des mois ou des années plus tôt." Argument que Léon DAUDET avait utilisé la veille dans L'ACTION FRANÇAISE.
Les communistes ajoutaient: "Derrière l'invasion policière de la Corse, il y a les "ministres corses", Landry et Pietri qui ont sans nul doute de bonnes raisons politiques... et surtout électorales de se débarrasser de gens qui les gênent."
Ce jour-là, pas d'article de fond dans L'ACTION FRANÇAISE qui insista sur le "temps affreusement pluvieux qui continue à sévir sur la plus grande partie de la Corse" et qui annonça une arrestation à VICO: "Un inspecteur de la police mobile, accompagnant des gendarmes de la brigade de Vico, a procédé à l'arrestation dans cette localité d'un nommé Joseph Carlotti qui, plusieurs fois avait donné asile à l'assassin Caviglioli.»